Trois petits tours et puis s'en vont...
Voilà un an que la célèbre Mme Vasseur, médecin de la Santé, sortait
à grands renforts de publicité son livre qui allait bouleverser le PPF
(Paysage Pénitentiaire Français), et s'indigner les parlementaires qui
étalèrent leur humanisme sous les sunlights de l'info.
Un tourbillon de hauts cris et d'effroi déferla, envahissant les
médias. Certains se saisirent de l'occasion pour battre la campagne,
opportunisme, humanisme, peu importe pourvu que cela rime... Chacun
poussera sa chansonnette.
Etions-nous sur la bonne voie ?
Les mois suivants virent de nombreux cortèges sillonner la campagne
découvrant la larme à l'oeil ce qu'était une prison où faisant semblan
de la découvrir, jurant bien fort la main sur le coeur que l'on allait
voir ce que l'on allait voir, qu'on ne pouvait plus tolérer... de telles
pratiques et que l'on devait cesser d'imposer de telles conditions
d'existence à des êtres humains.
Un an plus tard que reste-t-il de vos discours ? Rien n'a changé.
Vous, députés et sénateurs réunis, politiciens de tous bords avez
regagné les lambris dorés de cette république que nous ne voulons pas
être la nôtre, nous laissant toujours et encore crever de la même façon
lente et certaine dans les mêmes prisons qui vous ont pourtant horrifiés
il n'y a pas si longtemps encore.
Au fait, pourriez-vous nous préciser ce que vous auriez aimé voir
changé ?
Les méthodes d'élimination qui nous frappe ?
L'état de décrépitude des wagons qui nous mènent vers cette mort
lente et certaine à laquelle vous nous avez destiné ?
On y crève toujours de la même façon lente et certaine, soumis au
dictat de la matonnerie qui la rage au ventre, les yeux tout embués de
la nostalgie des temps où ils n'étaient pas tenu de nous appeler
Monsieur pour nous ordonner de nous pencher en avant jambes écartées
pour apprécier l'état d'un anus dont on ne sait ce qu'il pourrait
receler. Tel est le prix à payer pour arracher un moment de vie avec
ceux que l'on aime.
On y crève toujours de la même façon lente et certaine, victime du
trop triste complot des blouses blanches qui jugent l'état de santé
satisfaisant de ceux d'entre nous qui sont atteints de toutes les
maladies possibles, SIDA, Leucémies, cancers... jusqu'au moment de les
envoyer mourir dans des hôpitaux civils juste pour qu'ils ne meurent pas
sous écrou.
On y crève toujours de la même façon lente et certaine, sans espoir
dans vos centrales de sécurité d'où l'on ne sort plus, sinon en fin de
peine. Ces centrales que votre volonté politique a transformé en de
véritables éliminatoriums où la mort rôde toujours plus lente, toujours
plus présente, TOUJOURS PLUS EFFICACE.
On y crève toujours de la même façon lente et certaine dans les
quartiers d'isolement subissant les séances de torture blanche que vous
avez instaurée afin de réduire ceux d'entre nous qui refusent cet
anéantissement, toujours animé d'esprit de résistance, ceux qui refusent
de collaborer, ceux qui ne veulent pas crever. Torture blanche que vous
avez poussé jusqu'au raffinement, usant de la psychiatrie pour
décrédibiliser ceux qui veulent toujours lutter, un fou fait toujours
rire...
On y crève toujours de la même façon lente et certaine en butte à
l'indifférence des hauts magistrats de la chancellerie, alléchés par
leur plan de carrière et disponibles aux impératifs électoraux de leur
hiérarchie. Tous ces magistrats ont sur la conscience, si tant est que
l'on puisse encore supposer qu'ils en aient eu une, des centaines de
morts. Mort de prisonniers malades laissés sans soins appropriés, mort
de prisonniers arrivés au fond du désespoir qui, fatigués d'espérer, ont
préféré choisir eux-mêmes le moment de la triste fin à laquelle vous les
aviez destiné.
On y crève toujours de la même façon lente et certaine devant la
souffrance de nos proches, de nos familles à qui vous imposez d'énormes
sacrifices en nous envoyant toujours plus loin d'eux. Certains d'entre
eux sont obligés de faire des voyages de 50 heures pour quelques
instants d'intimité toujours plus rare.
CA SUFFIT !!
Aujourd'hui, nous ne demandons plus notre liberté, nous l'exigeons.
Vos entrechats et votre verbe sont sans effets. Ils ne font plus
rêver personne. Ils nous agacent, ils nous dérangent.
Nous ne vous laisserons pas transformer les centrales où vous nous
tenez déportés en des Huntsville où le temps exécuterait à votre place
la sale besogne. Elles ne redeviendront plus les oubliettes des châteaux
que nos ancêtres ont rasé aux temps de vos révolutions bourgeoises. Nots
ne seront plus les serfs de votre seigneurie revancharde.
On y crève et vous construisez encore de nouvelles prisons.
Merci, votre acharnement nous a ouvert les portes de la résistance,
nous refusons de crever, faisant ainsi les frais de votre gestion
sécuritaire et bourgeoise.
Libération de tous les prisonniers conditionnables et malades.
Fermeture immédiate des quartiers d'isolement.
Collectif des Prisonniers de Lannemezan.
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