Compte rendu non exhaustif d¹une salade d'embrouilles à la Niçoise !
Mercredi 6 décembre, 5 h du mat, gare Matabiau Toulouse, nous nous sommes retrouvés
une petite quinzaine pour la prise du bus «autogéré» (enfin, l'autre) en
partance pour en découdre avec le sommet et son contre......
Depuis deux mois, un groupe de quelques personnes s'affairait à monter en
coordination (via Internet) une action train gratuit pour Nice.
Deux bus étaient donc prévus au départ de Toulouse, un à 5 h du mat,
l'autre disponible au cas où l'action tournerait au vinaigre. Cette
précaution s¹est révélée judicieuse: les hôtesses d'accueil, du hall
central de la gare Matabiau, arboraient des uniformes plus virils qu'à
l'accoutumée, transportés par sept cars. Résultat, les rescapés de
l'opération T.G.P. (train gratuit plouff), n'arriveront à Nice qu'à 2 h du
matin.
Première vision de la ville dans le bus arrivé à 14h30: des cohortes de bus
en tout genre (d'un plus haut standing que le nôtre) quelques centaines,
étiquetés CGT, UGT(espagnole), CFDT... le temps de trouver à se garer, nous
avons croisé des milliers d'humains-sandwiches, aux couleurs de leurs
syndicats, pour la C.G.T. des dossards tout plastique blanc (en XXXL la
taille unique). Une moyenne d'un drapeau toutes les 4 personnes. Les
Basques, c'est un par personne, le drapeau. Pour dire, beaucoup
d'étiquetage.
La gôche plurielle avait battu le rappel de ses troupes, un aller-retour
dans la journée, en avion si nécessaire ! On a parlé de 50 000 à 80 000
personnes;
Apparemment les syndicats devant, puis les parlementaires: verts/LCR,
attak, les minorités locales; les assistantes sociales alternatives: DAL,
AC, etc. , pour se conclure par les tous noirs.
Le "contre sommet" ceux qui étaient sensés accueillir, avait négocié avec
la Mairie un gymnase surplombé par deux séries de gradins, qui leur servait
de salle de forums, débats, sur la mondialisation-tion, enfin contre...
quelques tables pleines de pub: les turcs, la ligue, attack..., une tribune
et un micro.
Les organisateurs, indétectables; les informations sur la manif du
lendemain, introuvables, plus de rumeurs que de beurre en broche...
Un squat, ancestral, «les diables bleus» servait d'infrastructure à Indy
média, le contre média fait par des journalistes confirmés et improvisés,
qui récoltent l¹information que l'on (est un con) leur amène pour diffusion
sur Internet. Ils appellent à s¹improviser cameraman, photographe,
rapporteur...
Un réseau «libertaro-ramassis hétérogène d'anti» ceux qui veulent en
découdre: éparpillés, affairés à trouver leurs potes, des nouvelles des
camarades bloqués dans les trains gratuits, à effectuer des repérages...etc.
Donc, aucune possibilité d'un semblant d'échange formel sur le thème de
l'occupation de la ville et le blocage pratique du sommet.
Côté infrastructure logistique pour l'accueil et l'hébergement des gens:
Un squat ouvert depuis deux jours s'est fait vider manu-militari par les
flics le mercredi après-midi.
Les Zorganisateurs s'étaient faits prêter le parking souterrain d¹un petit
supermarché, ils l'avaient équipé de trois chiottes en emballage plastique
et de quelques cartons... où une cinquantaine de français se méfiant d'un
mouvement aussi écu-mais-nique , a tenté d'y improviser une réunion. Cela a
très vite tourné en eau de boudin par manque d'infos.
Nous savions que 1500 italiens étaient bloqués à la frontière depuis le
matin. Pas mal de CRS et de gardes mobiles étaient mobilisés sur
l'opération.
Le mercredi en fin d'après midi, au moment du départ des bus syndicaux, à
la fin de la grosse manif, une rumeur circulait d'action sur la gare, en
soutien aux Italiens. Quelques milliers de personnes constitués en partie
par une queue de manif, ont investi la gare, pétés quelques portes,
balancés quelques projectiles contre des C.R.S. qui ont riposté en gazant
abondamment la place.
Deux personnes au moins se sont fait embarquer puis relâcher dans les
heures qui ont suivies.
Pour la soirée, le contre sommet avait prévu une grand-messe avec des
intervenants pointus et savants sur différents domaines touchant à la
merdialisation. Envolées lyriques au micro, en différentes langues,
injonctions à arrêter de fumer, suivies des dernières instructions pour le
lendemain.
La stratégie militaire consistait à démarrer de deux points de la ville: à
l¹ouest (gare centrale), à l'est (place st roc) pour prendre le sommet en
sandwich et l¹empêcher. Motivés. Tous ensemble. Motivés. Te
Apparemment il était aussi question d¹une délégation qui viendrait déposer
dans les mains de la présidence du sommet, les exigences, à défaut les
doléances des manifestants en matière de charte sociale.
Un départ était prévu à 7 h mais des groupes, déjà constitués, s¹étaient
vus attribuer des rues à occuper.
Devait s'ensuivre un bal rock, en plein air sur une place contiguë. Des
rumeurs annonçaient que les organisateurs avaient prévu une nuit chaude et
festive...La vérité.
Il est intéressant de noter le nombre d¹équipes de tournage: TV, ... médias
en toucouleurs, tougenres....
Jeudi, 7 h du matin, sous les lumières blafardes du coaxial municipal vers
l'est se rejoignent les Anglais, chacun sa pancarte; les Basques chacun son
drapeau, le coin rouge: LCR avec SO et chaîne humaine, Atack très chaud en
gueule, un gros morceau rouge et noir, pour finir en noir, .. Difficile à
estimer peut-être 2 à 3000 personnes, foulards, bonnets, qui masques à gaz,
une ambiance très chaude, des slogans en toutes les langues.
De l'autre coté, à l'ouest, le cortège plus «mou» syndical (sud), les turcs
et quelques égarés du réseau No Pasaran qui avait changé le rencart au
dernier moment...
Aucune difficulté de part et d¹autre à approcher la ceinture de C.R.S. en
protection rapprochée du sommet. Des systèmes de barrières assuraient un
sas de sécurité. Les C.R.S. étaient en assez faible nombre derrière.
Lorsque que le cortège est arrivé au niveau des premières lignes il
paraissait possible d'enfoncer les barrières et leur gardes. La LCR en tête
du cortège s'est mise à courir loin des cordons de CRS.
Les premières lacrymaux ont été tirées vers 9h ces salves marquaient
l¹abandon de l'idée de blocage. Les groupes se sont un peu éclatés, tout en
revenant à l¹assaut à différents endroits.
Dans le même temps côté Ouest, voitures et autobus de conférenciers
passaient allègrement sous la huée de petites centaines de porteurs de
badges et de drapeaux.
Les groupes français ne semblaient pas avoir de stratégies précises,
d¹envies ou de cibles ! ! ! Hormis les orgas qui avaient pour objectifs de
tenir leur contre-sommet, donc des forums programmés dés 12h30 suivis
d¹actions. Le matin les pavés, l¹après-midi la plage.
Sur le front: échauffourées, apparitions ponctuelles de black-bandes,
entrecoupées de passages d¹équipes vidéo, beaucoup de lacrymaux... pas
vraiment de charge surtout des décharges.
Une banque, une agence immobilière, des concessionnaires automobile, (sept
magasins dixit Nice matin) ont été brûlés, cassés ou les deux, uniquement
des objectifs ciblés, anticapitlistement corrects.
Quelques barricades ont été mises en place par ceux qui en ont une pratique
régulière. Des courses poursuites dans les rues d¹un quartier assez
populaire, en parallèle des regroupements, un taureau italien (placide)
venu pour l'occasion....
Plusieurs arrestations (sept recensées) ont été faites à ce moment.
Les organisateurs: attack, lcr... se sont repliés assez vite.
Au alentour de 13h, il ne restait presque personne au centre ville.
Beaucoup de monde s¹est retrouvé au Gymnase. Après avoir subi quelques
discours politiques, pouvoir du gardien du micro exige, un représentant
italien a pris la parole: deux propositions, aller à Vintimille pour
«libérer» la frontière ou partir sur le commissariat lieu de détention d'au
moins un italien raflé pendant la manif.
Un cortège de peut-être 2000 personnes est parti en direction du
commissariat situé dans une caserne à deux rues du Gymnase.
Donc petite rue, gros cortège, plein d'uniformes en face.
Tirs de grenades comme s'il en pleuvait, un manifestant est parti en
ambulance pour suffocation. Deux hélicoptères tournaient en permanence sur
le périmètre.
Charge de flics qui en ont profiter pour se déployer dans le quartier. Peu
de jet de projectiles. Apparition du canon à eau. Les manifestants
repoussés dans un premier temps jusque devant la salle qui a été
allègrement gazée.
Les flics ont encerclé la salle en repoussant en parallèle ceux qui étaient
à l¹extérieur vers une grande avenue.
1500 personnes sont restées bloquées quelques temps à l¹intérieur. Par une
porte restée ouverte un flic a tiré quelques balles en caoutchouc.
Les courses poursuites s¹étant éloignées du gymnase, les
contre-sommettistes reprenaient leurs forums et débats ... "il ne fallait
pas céder aux provocations des flics".
Le quartier était alors quadrillé, le canon à eau et les lacrymaux faisant
reculer les manifestants. A deux pas de là les fourgons grillagés étaient
prêts à recevoir les manifestants arrêtés. Des dizaines de fourgons de
police sont partis, sirènes hurlantes, faire leur office de ramassage,
accompagnées par les flics de la BAC.
Une soixantaine de personnes a été interpellée à ce moment là.
Difficile d¹apprendre quoi que ce soit sur les arrestations: pas de liste
disponible des personnes disparues ... La seule source d¹infos restant
Indymedia ... Mais déception: aux Diables Bleus, rien ne semblait perturber
l'ambiance cool et musicale de cette belle après-midi niçoise.
Jeudi 17h00, c¹est la débandade. Chacun s'occupe de retrouver ses amis et
compagnons de voyage pour quitter qui en voiture, qui par train, qui par
bus cette ville si peu accueillante.
Pendant ce temps, côté ouest, (chacun son tour) les fachos manifestaient
contre l'Europe et cognaient en passant quelques anti-fachos. Les
loyalistes et régionalistes, avec en tête, Daniel Cohn- Bendix
manifestaient pour une Europe fédérale, avant de se retrouver dans un
meeting calme et religieux, dans un cinéma situé loin du gymnase où
l'atmosphère était plus tendue.
Bilan des poursuites:
Dans le commissariat: interrogatoires, confrontations avec des gardes
mobiles, vérifications à l¹aide des images prises par les hélicoptères ....
Les personnes interceptées dans les rafles de police, après avoir effectué
les fiches anthropométriques, ont été inculpées ou relâchées. Deux jeunes
espagnols d'origine basque ont écopé, en comparution immédiate (le
vendredi), de 1 mois de prison ferme et deux ans d'interdiction de séjour,
pour être en possession d'opinels et de foulard. Pour l'un des deux,
c'était la première manif
Cinq français, interpellés le matin, sont inculpés "d'obstruction à la
circulation" pour avoir renseigné une voiture de congressistes italiens
égarée, les comparutions s'échelonnent du 1er février à mi-mars.
A la frontière italienne:
Les 2000 Italiens bloqués à Vintimille après avoir négocié durant un jour
et demi, avoir dormi dans les trains se sont faits copieusement gazer. Il y
a eu quelques affrontements. Le jeudi en fin d'après-midi, un groupe s'est
rendu à la frontière pour protester. A cette occasion, 20 espagnols qui
avaient franchi la frontière se sont vus refuser le retour en France.
Vendredi soir, suite à une manif, le préfet a accepté de les laisser
repartir en Espagne sous escorte jusqu'à Marseille !
Cet épisode a marqué les esprits sur la libre circulation en Europe.
Par contre, pas mal de manifestants à Nice s'attendaient à l¹arrivée des
tutti bianchi et de leurs amis, pour impulser une dynamique de résistance
plus organisée et déterminée. Même si leur absence était frustrante,
évitons le "Que faire en attendant Zorro ?" Les effets pervers du
vedettariat...
La logistique de soutien aux arrêtés ou aux interdits de séjour:
Un pool d'avocat d'attack était sensé assurer un relais juridique. Un seul
numéro de tél. occupé trop souvent. Il fallait donner l¹identité de la
personne éventuellemnt arrêtée, trouver un témoin... Ils ne paraissaient
pas disposer à téléphoner systématiquement au commissariat ou à assurer une
pression. Cela ressemblait plus à un service distant et pas vraiment
impliqué dans la situation. Aucun avocat n¹était présent dans les
différents commissariats. Ils paraissaient plus en recherche de témoignage
pour interpeller par la suite la cour européenne.
Aucune réunion ne s'est mis en place pour traiter des arrestations et du
comment y répondre.
Ce qui a motivé la présence des avocats:
- à la suite de Prague différents mouvements ont demandé aux organisateurs
de se munir d¹avocats, mais pas des inexpérimentés.....
- une quasi-certitude d¹arrestations massives, renforcée par l'annonce de
200 arrestations par le préfet bien avant la manif.
- pour se donner un semblant de logistique permettant une bonne conscience
sur cette question ?
Du côté des organisateurs du sommet, la manif s'était déroulée normalement
le matin, pour le reste, que les casseurs prennent leurs responsabilités !
Les actions durant les trois jours:
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