Grève de la faim contre mort lente
- Lannemezan : grève de la faim d'Eric Minetto -
Eric Minetto, incarcéré depuis maintenant 20 ans dans les geôles
françaises, a entamé une grève de la faim illimitée le 28 septembre afin
d'obtenir enfin sa mise en liberté conditionnelle, qui lui a été refusée
pour la quatrième fois alors que les enquêtes effectuées lui sont
favorables. Une pétition circule. Alors que nous sommes actuellement en France dans un contexte
de dénonciation de la détention, des conditions de détention, des
longues peines, Guigou ne semble aucunement motivée à suivre la
tendance, comme le souligne un groupe de prisonniers solidaires d'Eric
de la MC de Lannemezan dans le communiqué suivant :
Ce jour, Eric Minetto, détenu à la Centrale de Lannemezan, engage une
grève de la faim illimitée. Il entreprend cette lutte après le rejet de
quatre demandes de libération conditionnelle depuis le fin de la période
de sûreté. Ce sera un combat jusqu'au bout, si sa libération est encore
repoussée.
Le jeudi 28 septembre est une date importante pour Eric, vingt ans
qu'il est emprisonné. Vingt ans jour pour jour, jour après jour.
Lorsqu'il a été arrêté en 1980, la France vivait encore sous les lois
" sécurité et liberté" de Peyrefitte, Barre était encore le meilleur
économiste et Premier ministre, Mitterand n'avait pas été élu. Dans le
14ème arrondissement de Paris, Eric était un militant bien connu du
mouvement autonome. Il vécut dans les squats rue Raymond Losserand, il
lutta contre les sociétés immobilières qui ravageaient ce quartier
populaire, contre la vie chère, contre la société nucléaire...
Il avait vingt ans, il en a aujourd'hui quarante.
Vingt ans dans le système pénitentiaire français. Il connut les QHS
et leurs héritiers : les quartiers d'isolement. Il endura la torture
blanche de la solitude forcée puis l'horreur des bâtiments surpeuplés de
Fresnes et de la Santé. Au cours de ces longues années, il fut de toutes
les luttes et de tous les combats. Il le paya au prix fort.
Vingt ans de prison et il est encore et toujours détenu dans une
centrale de Sécurité !
Cette lutte révèle l'état de désespérance et de révolte des longues
peines dans les prisons françaises. Elle dépasse largement un cas isolé
ou une situation marginale. Elle nous concerne tous, prisonniers sociaux
et prisonniers politiques.
Depuis les années 80, les peines prononcées par les tribunaux n'ont
jamais été aussi lourdes. Pour des faits identiques, elles se sont
allongées de plus du tiers quand ce n'est du double. Parallèlement, les
mesures d'aménagement de peine tombent en désuétude ou bien sont
appliquées pour des gens qui hier encore ne seraient jamais tombés en
prison. Les peines de substitution ne permettent aucunement de trouver
de nouvelles voies de réinsertion, elles sont simplement utilisées pour
mettre sous contrôle plus de pauvres dans les cités de la précarité
générale.
Pour les longues peines, il n'y a plus de commutation de la peine
perpétuelle, il y a moins de confusion, moins de compression à 20 ans et
par dessus tout, il n'y a plus de libération conditionnelle. Depuis 6
ans, ici à Lannemezan, dans le bàtiment B où nous sommes les plus
nombreux, aucun prisonniers n'a bénéficié d'une libération
conditionnelle. Aucun. Ici les détenus ne sortent qu'en fin de peine.
Jour pour jour.
Pour les perpétuités, la situation est dramatique. Il y aurait en
France plus de 600 condamnés à perpétuité. Parmi eux, 200 sont
libérables puisque ayant terminé leur peine de sûreté de 15 ans ou de 18
ans. Pourtant depuis son arrivée au ministère, Guigou n'a accordé de
libération conditionnelle qu'à six d'entre eux !
Où va-t-on ? Si nous ne réagissons pas, si nous ne luttons pas tous
ensemble ?
Comme hier Karim Khalki, aujourd'hui Eric Minetto a décidé de
s'opposer à la mort lente. Et sa lutte est notre lutte à tous. C'est
pourquoi nous le soutiendrons jusqu'au bout !
En luttant pour la libération d'Eric, nous posons une limite ferme à
la détention de tous :
Vingt ans, ça suffit !
Libération de tous les prisonniers ayant accompli vingt ans.
Libération de tous les prisonniers malades.
Fermeture des quartiers d'isolement.
Des prisonniers
Centrale de Lannemezan
28 septembre 2000
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